Ouïe Magazine
Publié le 05/07/2017

Thibault Duchemin, l’un des trois créateurs de cette appli pour smartphone, a lancé aujourd’hui officiellement sa version française, qui permet aux personnes sourdes et malentendantes d’obtenir un sous-titrage immédiat, y compris en conversation à plusieurs.

 

C’est l’histoire d’un CODA. Cet acronyme anglais signifie : Child of Deaf Adult. Thibault Duchemin a grandi avec deux parents et une sœur sourds et connaît les frustrations des malentendants face aux situations de communication quotidiennes. Vous avez sans doute vu La famille Bélier… Avant de mettre au point son appli, le jeune homme de 26 ans est passé par les Ponts et Chaussées et par Berkeley aux Etats-Unis. Il y a rencontré deux autres jeunes ingénieurs, le Hollandais Pieter Doevendans et le Taïwanais Skinner Cheng -lui-même sourd- et ils ont conçu ensemble Ava (Audio Visual Accessibility). Une fois téléchargée sur smartphone, leur appli traduit la parole en mots, soit en face à face (la personne parle dans le micro du téléphone et le malentendant lit sur l’écran) soit en conversation : les interlocuteurs se connectent à une discussion commune comme dans WhatsApp, chacun s’exprime dans son smartphone et les échanges apparaissent sous forme de discussion, chaque personne étant identifiée par une couleur. Soyons clairs : l’immédiateté est là et la reconnaissance vocale fonctionne… Dans certaines limites : il y a quelques fautes et le service marche incontestablement mieux dans un environnement calme, si chacun articule. Mais venant de la lecture labiale, Ava offre une alternative performante aux malentendants.

 

Ce système de transcription portable répond à nombre de situations problématiques que rencontrent les malentendants : guichet d’une administration, rendez-vous médical, cours à l’université, repas de famille… Le premier entretien avec un audioprothésiste entre évidemment dans ce cadre. Cependant, c’est sans doute dans la vie professionnelle que l’appli pourrait se révéler la plus bluffante pour favoriser l’inclusion des personnes malentendantes : lors d’une réunion inopinée, pour les discussions informelles autour d’un café, au restaurant d’entreprise ou pour un déjeuner de travail… Les environnements bruyants restent, on le sait, difficiles à gérer, y compris pour les personnes appareillées. Ava viendrait faire la médiation pour tous les cas de figure dans lesquels les entreprises ne peuvent ou ne veulent pas financer un interprète LSF ou un service de transcription.

 

 

La start up créée en 2014 par Thibault Duchemin et ses deux acolytes a fait mouche : après une opération de financement participatif sur la plateforme Indiegogo, qui leur a permis de lever 45 000 dollars, ils ont fait une levée de fonds de 1,8 million de dollars en France et aux Etats-Unis. Lancée il y a un peu moins de 6 mois aux Etats-Unis, l’appli compte déjà 50 000 utilisateurs. L’équipe internationale de la start up se compose actuellement de 5 permanents et 3 stagiaires. Thibault Duchemin va rester implanté en Californie et c’est Alexandre Hannebelle qui chapeautera le développement d’Ava en France.  Elle est disponible gratuitement pour 5 heures de transcription par mois et en illimité pour 29,99 euros par mois. Des forfaits entreprise sont également proposés.

Ava a déjà été plusieurs fois primée : arrivée première au concours de l’université Berkeley Launch en 2015, prix Handicap de l’Organisme commun des institutions de rente et de prévoyance (Ocirp) dans la catégorie recherche appliquée et innovations technologiques, remis il y a quelques jours. Et Thibault Duchemin vient aussi d’être distingué comme talent de moins de 35 ans par la MIT Technology Review.

 

 

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