Ouïe Magazine
Publié le 06/04/2020

A l’écoute du terrain, L’Ouïe Magazine a pris des nouvelles d’audioprothésistes de diverses régions de France. Ces instantanés de confinement donnent un aperçu de vos problématiques pratiques et économiques, en ce printemps si particulier… Avec des points d’interrogation mais aussi beaucoup d’optimisme. Aujourd’hui, nous allons voir Florent Juan, fondateur de Pastel Audition, dans le Sud Ouest.

Bien qu’il ait anticipé la crise sanitaire, Florant Juan, qui gère avec ses deux associés 12 centres Pastel Audition autour de Toulouse, à Gaillac et Castelnaudary, et une vingtaine de salariés, a tout de même dû prendre la décision de fermer intégralement, en ne gardant que 4 collaborateurs en télétravail. « Je suis membre de l’association de chefs d’entreprises APM et une semaine avant les premières déclarations d’Emmanuel Macron, nous avons eu une réunion avec un spécialiste de la gestion de crise et un spécialiste des épidémies, raconte-t-il. Grâce à cela, j’ai pu envoyer une vidéo explicative à tous mes collaborateurs. Nous avions prévu un système d’isolement des centres afin que plus personne ne navigue de l’un à l’autre. La situation a évolué plus vite qu’on ne l’imaginait et le 15 mars, nous avons mis en place un process de fermeture. »

 

Une once de frustration

 

Une adresse mail d’urgence a été affichée sur toutes les devantures, chaque audioprothésiste pouvant rappeler directement ses patients en cas de problème. « Nous aurions pu nous organiser différemment si nous avions eu des protections mais ce n’est pas le cas et quand on voit que même des soignants en première ligne manquent de masques, on se dit qu’ils leurs sont plus utiles qu’à nous… Ce n’est pas une situation très facile, d’autant plus que nous sommes très orientés sur la qualité de service. En théorie, on peut bien livrer un écouteur neuf mais, pour un patient de 90 ans, il n’est pas facile de le changer, même avec une explication en visio. Fournir des piles n’est pas le plus compliqué : beaucoup de pharmaciens en ont et on en a déposé. » Le grand regret de l’audioprothésiste reste qu’il ne peut répondre à tous les cas de figure. « Nous avons acquis les outils de réglage à distance quand ils sont sortis chez GN Hearing mais nous n’avons pas les infrastructures digitales pour faire des réglages en ligne de n’importe où, détaille-t-il. D’ailleurs, sur 2 ou 3 mois, la principale problématique ce ne sont pas les réglages mais le SAV… Nous ne sommes pas en mesure de dépanner tous les patients. » Malgré cette insatisfaction, Florent Juan prend les choses avec philosophie – « nous sommes dans une situation inédite, ni nous, ni les dirigeants de notre pays, n’avons de repères, chacun essaie de s’adapter » – et garde une attitude à la fois altruiste et optimiste : « par rapport à d’autres entreprises, nous avons de la chance : beaucoup d’employeurs sont très inquiets avec une activité au point mort ou qui continue mais avec des collaborateurs qui ont peur de tomber malades… Nos salariés sont en sécurité chez eux ».

 

Des bénéfices secondairesFlorent Juan Slefie

 

Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, l’audio-chef d’entreprise met à profit cette situation exceptionnelle. « Dans les situations difficiles, il y a toujours un bénéfice secondaire et il faut se concentrer dessus, juge-t-il. Regardez, quand le confinement a commencé tous les gens ont rangé leur maison, c’est une façon de mettre en ordre ses idées. Avec mes associés, nous avons actuellement ce qui nous manque en général : la possibilité de nous concentrer sur le temps long. Il faut en profiter ! Nous construisons des projets d’entreprise sur 4 ans, en commun avec les équipes. Nous allons travailler là-dessus avec ceux qui le souhaitent. » Florent Juan a suivi 18 mois de formation à la TBS, The Business School de Toulouse, il s’est notamment penché sur les modèles de développement. « C’est la question que nous allons nous poser pour les années qui viennent, explique-t-il. Comment doit se développer notre réseau ? En nom propre ? En franchise ?  Nous sommes une entreprise collaborative, notre management est très horizontal et nous avons l’opportunité de réfléchir aux façons d’aller encore plus dans ce sens. »

 

Anticiper les difficultés sans pessimisme

 

Pastel Audition investit énormément dans la formation et les cessions qui étaient prévues pour mars et avril seront repoussées, seules les séances de coaching, qui se renouvellent 4 fois par an, seront potentiellement maintenues, à distance « mais je dois tenir compte du fait que certains collaborateurs ont des jeunes enfants et qu’il ne sera pas forcément facile pour eux de se libérer », précise Florent Juan. « Juste avant le confinement, nous étions en négociation avec un opérateur téléphonique pour mettre en place un outil de visioconférence utilisable pour des démos. Avec cette crise sanitaire, tout le monde est en train de s’approprier ces outils. Les salariés ont entre 21 et 58 ans, il y a des personnes plus ou moins habituées à les utiliser… » L’audioprothésiste voit l’avenir plutôt sereinement sans cacher qu’une période difficile économiquement va s’ouvrir : « la reprise ne sera vraisemblablement que partielle et il va falloir gérer cette transition durant laquelle les collaborateurs vont reprendre le travail sans dégager aucune ressource dans un premier temps ». Globalement, il voit un avenir positif pour son activité. « Nous avons la chance que les personnes qui ne peuvent pas se faire appareiller en avril pourront le faire en juin ou juillet. Les prévisions pour 2021 sont très bien orientées. Certes, nous traversons un épisode compliqué, nous perdons de l’argent, mais nous avons devant nous des temps meilleurs. »

 

 

 

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#1 Stéphane Le Strat répond aux patients désemparés

#2 Charles-Alexis Gasnier pense aux patients qui auront le déclic pendant le confinement

#4 Sandra Amégée prend des forces en attendant la reprise

#5 Vanina Decelle entretient le lien social

#6 Marie-Sophie Janssen ne veut pas laisser tomber ses patients

#7 Damien Passerat définit des mesures barrières rassurantes pour la fin du confinement

#8 Appareillage à distance : Yves Lasry teste la première solution globale

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