Ouïe Magazine
Publié le 17/01/2022

 

Partant du succès quantitatif aux « effets qualitatifs incertains » du 100 % santé, le rapport de l’Igas sur la filière auditive, publié ce lundi 17 janvier, liste 30 recommandations précises pour l’avenir de l’audioprothèse et de l’audiologie.

 

Il y a 10 mois, l’Inspection générale des Affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) ont été mandatées par les ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur pour réaliser une 1ère évaluation de la réforme et réfléchir à l’évolution des pratiques professionnelles dans la filière auditive. Issues d’un nombre colossal d’entretiens, les 30 recommandations mises en avant dans le rapport* dressent un tour d’horizon exhaustif et précis.

 

Créer une « obligation de reversement » du forfait perçu par l’audio si le suivi n’est pas effectué

Sur la mise en œuvre de la réforme,  les recommandations vont dans le sens de mesures déjà prévues ou consubstantielles du 100 % santé : comptes-rendus normalisés obligatoires, questionnaires de satisfaction patient courts et simples, télétransmission systématique et obligatoire des prestations de suivi… L’Igas estime souhaitable d’enclencher la clause de volume qui prévoyait, dès l’accord de 2018, l’abaissement du prix de vente limite des appareils de classe I à 900 euros, à la fin du 1er trimestre 2022. Elle appelle de ses voeux des contrôles renforcés des audioprothésistes. Mais sa 1ère recommandation a de quoi surprendre. Le couplage appareil-prestation de suivi devrait, selon elle, être conditionné à l’obligation faite aux audios de reverser une partie du forfait perçu « en fonction de la matérialité du suivi assurée par ce dernier (appréciée, par exemple, par le taux annuel global de prestations de suivi dans la file active de chaque audioprothésiste) ». Cette recommandation n’est cependant pas présentée comme urgente (niveau de priorité coté 2 sur 3).

 

Concernant la prise en charge des aides auditives, l’Igas a retenu une mesure demandée par les audioprothésistes, l’extension du tiers payant intégral à la classe II, mais ne s’est pas positionnée sur le niveau de prise en charge de la classe II par les Ocam, renvoyant cette question aux débats du HCAAM.

 

Renforcer l’encadrement de l’exercice professionnel

Une série de recommandations visent à mieux répondre aux enjeux de santé publique autour de l’audition et à développer la prévention : systématisation du dépistage à 55 ans, expérimentation de la télé-audiologie dans les zones sous denses et les Ehpad, installation de référents ‘’audition’’ dans ces établissements, protocole adapté pour les personnes âgées ne pouvant se déplacer, élaboration d’une stratégie pluriannuelle sur l’audition, encouragement du travail aidé pour les ORL libéraux, définition de parcours de soins types…

 

Plus engagés, les auteurs du rapport ont suivi certaines revendications portées par le SDA, en préconisant de préciser, par décret, les compétences respectives de l’audioprothésiste et de l’assistant et d’adopter un décret en Conseil d’Etat fixant les règles de la profession (au-delà de la convention avec l’Assurance maladie, en cours d’agrément). Celles-ci incluraient notamment un encadrement de la transparence pour « limiter au maximum les risques de conflit d’intérêt ». Mais ces règles devraient émaner d’un consensus entre les 3 organisations représentatives de la profession et ne pas entraver la concurrence.

 

Pas moins de 3 universités envisageraient d’ouvrir à cours terme une formation d’audioprothésistes (Tours, Grenoble, Clermont-Ferrand).

 

Formation : l’Igas dit franchement « oui » au relèvement du numerus clausus

Après avoir pris connaissance des modélisations du Synea et du CNA, elle juge cette hausse indispensable, dès maintenant, pour assurer la qualité du suivi audioprothétique. L’augmentation des quotas devrait selon elle être forte mais limitée dans le temps : « 150 à 200 places supplémentaires pendant 5 ans ». L’Igas souhaite cependant une analyse de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé, quant l’évolution des quotas à plus long terme.

 

Plusieurs autres recommandations ont pour but de sécuriser les parcours de formation (par la voie de l’apprentissage, entre autres) et l’accès aux autorisations d’exercice de la profession, avec le souci de ne pas fermer cette possibilité – ce serait contraire à la réglementation européenne – mais d’unifier les mesures compensatoires demandées aux personnes diplômées à l’étranger, d’harmoniser les critères d’agrément des maîtres de stage et d’en constituer une liste unique au niveau régional.

 

Combien de recommandations seront-elles suivies d’effets ?

La question est évidemment impossible à trancher, car une partie d’entre elles ne font que reconduire des orientations maintes fois formulées comme la réingénierie du diplôme d’Etat, la reconnaissance du grade licence, le développement des masters spécialisés, ou encore l’instauration de formations paramédicales communes.

 

Une recommandation a d’ores et déjà été mise en œuvre par le gouvernement (la n°15) : le report de l’obligation de formation en otologie médicale pour les médecins généralistes souhaitant primo-prescrire des aides auditives.

 

 

 

 

*Rapport Evaluation de la filière auditive, Pierre Mainguy et Louis-Charles Viossat pour l’Igas, Amaury Fléges  pour l’IGESR, avec le concours de Joachim Baba, stagiaire à l’Igas, novembre 2021.

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