Lors du 44ème Congrès, le SDA a réuni Sophie Kelley, responsable du département des produits de santé à la Cnam, et Julie Pougheon, conseillère spéciale de la DGOS (Direction générale de l’offre de soins, ministère de la Santé). Elles ont évoqué les travaux actuellement menés pour l’avenir de l’audioprothèse en France, au regard des grands enjeux de la profession, qualifiée de « plus belle réussite du 100 % santé ».
100 % santé, prestations de suivi et télétransmissions
Sophie Kelley a rappelé les chiffres principaux du secteur (409 M€ remboursés par l’AMO pour les aides auditives en 2023, 39 % de classe I) et salué l’implication des audios dans la réforme : en 2023, les prix limites de vente étaient respectés pour 99,8 % des équipements 100 % santé (hors délivrance C2S). Elle a souligné que la Cnam a mené une campagne auprès de la profession et des patients sur l’importance des prestations de suivi et de leur télétransmission (mailing auprès des 772 000 assurés appareillés en 2021, envoi d’un courrier à 4 550 audios et visites de délégués de l’Assurance maladie dans 4 000 centres). Celle-ci a porté ses fruits, puisque 2,2 millions de prestations de suivi ont été transmises en 2023, contre un peu plus d’1 million l’année précédente. Sophie Kelley a annoncé le lancement d’une nouvelle campagne d’incitation dans les jours qui viennent, puis mis en avant les apports de la convention Cnam de 2021 sur de nombreux sujets : modalités particulières de délivrance (vente en ligne uniquement autorisée pour les piles, illégalité de principe de l’activité itinérante, obligation d’une décision partagée pour les consultations de suivi à distance…), communication, création des instances conventionnelles pour « réfléchir en pleine concertation » à l’avenir de la profession, instauration d’un circuit de mise en cause conventionnelle des professionnels défaillants. Interpellée par le SDA sur la difficulté à faire respecter la règle des « 3 centres maximum pour 1 audio », Sophie Kelley a insisté sur le fait que « cette convention est un engagement ».
Décret de compétences et règles professionnelles
Pour Julie Pougheon, le 1er enjeu de la profession est la clarification des compétences. « Nous discutons souvent avec les syndicats de la mise en place d’un décret de compétences, qui nécessite une base légale qui n’existe pas. Mais il est possible de fixer des règles professionnelles, ce qui nous parait opportun. L’objectif est de définir un encadrement de la profession. C’est un travail prioritaire », a-t-elle annoncé. Ces règles pourraient voir le jour très prochainement : le ministère de la Santé travaille actuellement sur la création d’un tel cadre pour les orthophonistes et « enchaînera avec les audioprothésistes ».
Réingénierie de la formation
Selon la DGOS, cette réforme attendue de longue date et « cohérente avec la définition d’un référentiel d’activité », est bel et bien programmée par le ministère de la Santé et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche. Les travaux pourraient être lancés en 2025 pour une mise en œuvre à compter de la rentrée 2026. Concernant les diplômés issus des formations espagnoles, Julie Pougheon constate que les mesures compensatoires demandées pour exercer en France varient selon les régions. « Nous réfléchissons à harmoniser les critères d’évaluation de ces mesures », a-t-elle affirmé.
Accès à la prescription
La DGOS a conscience des problématiques d’accès à la prescription et évoque d’éventuelles délégations de tâches. « Nous aurons des échanges avec la HAS et les CNP sur la possibilité de permettre au prescripteur d’utiliser un audiogramme réalisé par un audioprothésiste. » Mais, dans l’attente, comment répondre aux besoins dans les zones sous-dotées ? Brice Jantzem, président du SDA, indique que « les prescriptions par téléconsultation sont refusées » par les CPAM, ce qui crée une « insécurité pour l’audio », et propose la mise en place d’outils permettant de vérifier en amont le droit de prescription du médecin. Les primo-prescriptions par les généralistes non formés, interdites depuis 18 mois, font cependant « l’objet d’une consigne de souplesse » de la part de l’Assurance maladie, a temporisé la représentante de la Cnam.
Exercice hors-centre
Julie Pougheon reconnaît « qu’aller vers certaines populations est un enjeu » et qu’il faut « travailler conjointement pour un accès aux soins dans de bonnes conditions ». Brice Jantzem, président de SDA, se montre pessimiste sur cette question au regard des difficultés à obtenir la mise en place de protocoles dérogatoires sur la base de l’article 51. La représentante de la DGOS, regrettant qu’il faille « attendre parfois 7 mois pour un bouchon de cérumen », appelle de ses vœux un modèle qui réponde au besoin des populations concernées (notamment les résidents des Ehpad) « et qui ne soit pas du démarchage commercial ». Les choses pourraient là aussi évoluer prochainement, Sophie Kelley ayant annoncé la création d’un groupe de travail dédié en commission mixte paritaire.
Prévention
Regrettant la non-application de l’article 15 de la convention Cnam, qui oblige les audios au respect d’une « parfaite éthique dans les pratiques de communication », le SDA réclame une grande campagne organisée par l’Assurance maladie. « Il faudrait renouveler celle faite au moment du 100 % santé, reconnaît Julie Pougheon, et probablement encadrer la capacité de communication ». Elle considère que les bilans prévention récemment mis en place à différents âge de la vie pourraient être une base de discussion sur les troubles auditifs, l’importance de l’appareillage et la possibilité d’orienter les patients vers des outils d’auto-évaluation.